Gratipay, le financement participatif durable

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GratipayJ’avais en brouillon un article présentant Gratipay depuis pas mal de mois. Je comptais en parler plus en détail maintenant que je vous propose de soutenir mon activité sur ce blog qui au secours est devenu payant 🙂 … enfin pour ceux qui peuvent et qui le veulent.

Gratipay ça marche comment ?

Le principe est assez simple. Tout d’abord, il vise à établir une relation de financement « durable ». C’est un point qui est intéressant, car il permet à un auteur ou un projet de bénéficier d’un revenu à peu près stable dans le temps. Les participants s’engagent à verser une somme donnée toutes les semaines. Pas de dons ponctuels avec Gratipay.

L’ouverture d’un compte sur Gratipay se fait de la même façon que vous soyez créateur ou donateur. Certains apprécieront d’autres pas du tout, mais l’authentification se fait au travers d’un compte sur un des services en ligne suivant : Twitter, Google+, Facebook, GitHub, Bitbucket et Openstreetmap. Évidemment si vous n’avez aucun compte sur un de ces services, cela complique un peu l’entrée. Par rapport à une approche « Michu centrée », je ne suis pas inquiet, ils ont forcément un compte Facebook.

Une fois votre compte ouvert, vous pouvez l’associer à un moyen de paiement. En l’occurrence votre carte bancaire. Là aussi j’imagine que certains vont faire la moue. Il y a intérêt à ce que l’information soit conservée de façon sécurisée et que l’infrastructure ne présente pas de faille de sécurité.

Contrairement à un système comme Flattr où je peux donner répartir mes dons comme je le souhaite par rapport à une somme mensuelle, Gratipay vous permet de définir la somme que vous allez verser toutes les semaines à un auteur ou à un projet. Il peut s’agir de quelques centimes à bien plus. C’est ensuite Gratipay qui se charge d’effectuer les versements et de recharger votre compte via votre carte de crédit. Le rechargement se fait par somme de 10 $ minimum. Ce fonctionnement a pour objectif de minimiser les frais de transaction bancaire évidemment.

Comment Gratipay se rémunère-t-il ?

Un point qui m’avait fait arrêter l’utilisation de Flattr, c’est le prélèvement de 10% sur les dons. Un pourcentage que je juge excessif pour une plate-forme que se contente de faire l’intermédiaire.

Gratipay se finance par les versements de ses utilisateurs. Autrement dit Gratipay (le projet) a un compte comme les autres utilisateurs du service. A charge pour les utilisateurs de jouer le jeu et de verser toutes les semaines une somme au projet. En dehors de cela, Gratipay ponctionne uniquement les frais liés aux transactions bancaires lors des paiements. Au final, cela permet de maximiser l’argent qui va à la création et pas à l’intermédiaire. Bref j’aime beaucoup le principe.

A noter que Gratipay ne fonctionne pour l’instant qu’en dollars. Il n’est de pas possible pour un Européen d’associer un compte en banque pour retirer l’argent issu des revenus qu’il perçoit. Ce point est à l’étude néanmoins.

Mais Gratipay risque de disparaître…

Ha ben tiens l’affaire paraissait trop belle pour durer 🙁 . Le service de paiement utilisé par Gratipay va fermer dans moins de deux mois. Il s’agit de Balanced Payments une société à l’origine de l’Open Company Initiative ou en français l’Initiative d’Entreprise Libre. Gratipay est d’ailleurs une entreprise adhérant à ce mouvement. Ces entreprises s’engagent à faire de l’ouverture un élément déterminant dans la façon de créer de la valeur.

Pour faire simple, Gratipay doit changer de service de paiement, probablement Stripe ou Braintree, mais il leur faut aussi « vider » les caisses si j’ai bien compris. Les utilisateurs qui ont des comptes positifs doivent transférer leur argent vers l’extérieur. L’ensemble doit être réalisé dans le court délai de deux mois ce qui semble une gageure pour l’équipe.

Si la situation n’est pas encore désespérée, à lire l’annonce, elle n’a rien de rassurant.

Un Gratipay en Europe ?

L’idéal serait évidemment que Gratipay puisse continuer son développement et supporter d’autres monnaies. L’alternative reste la mise en place d’une structure juridique et d’une instance dédiée pour notre zone euro. Sur le principe aucun obstacle puisque Gratipay respecte les principes du TIO loyal. Notamment, le code source du service est intégralement disponible sur GitHub.

Cependant le travail pour y arriver n’est pas mince. Le choix du statut pose également question. Personnellement, je serais favorable à un modèle associatif ou coopératif. Il est en effet sein que la gestion de ce type de structure soit la plus ouverte possible afin de s’assurer que l’argent collecté est avant tout utilisé pour rémunérer les auteurs. Nous mettons le doigt dans l’informatique que confiance.

Il lui faudrait aussi un petit nom sympa, si vous avez des idées, laissez-les en commentaire ! Tiens je propose FramaPay au hasard 😉 . Pour ceux qui voudraient carrément s’atteler à un tel projet; faites-le savoir en commentaire également.

Philippe Scoffoni

Je barbote dans la mare informatique depuis 30 ans (premier ordinateur à 16 ans, un ORIC ATMOS) et je travaille à mon compte au travers de ma société Open-DSI. J'accompagne les associations, TPE et PME dans leurs choix et dans la mise en oeuvre se solutions informatiques libres.

10 réponses

  1. Galuel dit :

    l’utilisation de Gratipay (je préférais le nom initial Gittip) serait cohérent avec une monnaie libre, au lieu de se retrouver coincé entre différents intermédiaires de paiements en monnaies non-libres.

    Il y a ainsi deux thèmes fondamentaux concernant ce sujet :

    (a) Gratipay applique le principe du libre (que Olivier Auber a étendu dans le P2P Manifesto) au sens où ses développeurs se placent eux-mêmes dans la même situation que ses utilisateurs (même moyen d’interaction monétaire = les développeurs ont eux-mêmes un compte Gratipay).

    (b) Le choix de la monnaie utilisée n’est pas vraiment cohérent s’agissant d’une monnaie non-libre. Aussi un projet immédiatement cohérent avec une monnaie libre consiste en une plate-forme de crowdfunding fondée sur cette même monnaie libre, et que les développeurs utiliseraient au même titre que les utilisateurs.

  2. bonob0h dit :

    Que fait Gratipay de l’argent déposé et avant qu’il ne le dépose à celui qui est payé chaque semaine ? L’argent dors ?

    Vu que Gratipay n’est pas en Euro etc … peut être que ça vaudrait le coup de tenter de proposer à une banque associative qui ne fait partie d’aucun groupe de se lancer dans une aventure ? http://www.lanef.com/ par exemple ?
    Prochaine AG le 30 Mai à Lyon 😉 l’occasion d’aller faire le Buzz ? 😉

  3. L’argent dort probablement.
    Je découvre d’ailleurs que ses statuts ont été modifié l’année dernière et en font un banque à part entière ce qui n’était pas le cas auparavant. Je ne sais pas dans quelle mesure elle est désormais détachée du Crédit Coopératif. A creuser s’ils ont des projets dans le domaine du crowfunding ou à défaut s’ils sont prêt à soutenir un projet…

  4. Tanéléo dit :

    Nos problématiques sont différentes puisque mon blog est un loisir. Cependant, avec les coûts de l’hébergement qui vont bientôt augmenter pour moi et le coût probable pour passer le site en SSL (il semble qu’on se dirige vers ce standard désormais), j’ai pensé également à mettre l’internaute en partie à contribution. Mais entre la pub et le financement direct (par des dons par exemple) je n’ai pas trouvé d’autres pistes. Ah si, j’avais pensé à faire payer les commentaires : un SMS surtaxé pour avoir le droit de commenter, mais bon… voilà quoi.

    Pour Gratipay c’est un peu dérangeant qu’ils gardent le numéro de CB avec le pictogramme à 3 chiffres afin de faire du renouvellement automatique. D’autres le font également (OVH notamment, et Free je crois), mais je trouve ce procédé discutable.

    Je te souhaite tout le succès que tu espères.

  5. bonob0h dit :

    Pour le moment https://twitter.com/bonob0h/status/595211384234840064
    ils n’ont vue que https://twitter.com/bonob0h/status/595211795675148288
    Surtout ils ont l’agrément comptes et livrets a vu !
    S’il veulent se bouger ils pourraient gagner une asso cliente qui pourrait peut être un jour avoir très gros comptes grâce au Web3D++ :p

  6. Bonjour,

    Je fais partie du service innovation de la Nef, et notre veille nous a propulsé vers ce bel endroit 😉
    Nous avons depuis janvier créé une adresse dédiée à l’innovation (innovation@lanef.com), qui concerne entre autres des propositions de collaboration comme la votre. Nous sommes bien évidemment tout à fait ouverts à en discuter et nous vous remercions d’avoir pensé à nous. Vous pouvez utiliser cette adresse pour nos prochains échanges.

    Pour répondre à deux interrogations présentes dans les commentaires :
    la Nef est une société financière coopérative, elle appartient donc à ses sociétaires sous la règle coopérative « 1 homme = 1 voix ». Nous ne sommes donc filiale de personne.
    Notre lien avec le Crédit Coopératif, qui est aussi une coopérative, est double : d’une part cet établissement garantit notre solvabilité, ce que la Banque de France impose aux établissements bancaires français en dehors des plus gros (BNP, SG, CA, etc.).
    D’autre part, nous avons des conventions concernant des produits de la Nef distribués par le Crédit Coopératif (Livret et compte-chèque avec moyens de paiement), car comme vous l’avez souligné nous n’avions pas l’agrément pour commercialiser nous-mêmes tous les produits bancaires. Depuis mi-avril, notre agrément est étendu aux livrets pour les particuliers et aux comptes à vue avec moyens de paiement et sans chéquier pour les personnes morales. L’agrément total, avec comptes-chèques pour particuliers notamment, est prévu pour 2017.

    Enfin, nous allons lancer très prochainement notre plateforme de finance participative, d’abord sur le don, puis sur le prêt (nous avions expérimenté en région Rhône-Alpes avec http://www.pret-de-chez-moi.coop/) et enfin l’investissement.

    Au plaisir de collaborer avec vous,

    Olivier Torrente pour le service innovation
    innovation@lanef.com

  7. Merci Olivier d’avoir pris la peine d’apporter ces précisions. Je vous envoie un mail pour prendre contact 😉

  8. Sarazin dit :

    Intéressé aussi pour participer à un gratipay en Europe. A voir si c’est nécessaire, car Gratipay arrivera peut-être à résoudre ses problématiques de paiement pour l’Europe (on devrait le savoir d’ici 2 mois).
    Et pour aussi permettre d’utiliser une une seconde monnaie basée sur la TRM au sein de l’application en parallèle de l’EURO 🙂

    Il y a aussi quelque chose dont on ne parle par beaucoup au sein de Gratipay et qui me semble fondamental, qui est le choix du modèle de rémunération de ses contributeurs : https://gratipay.com/Gratipay/members/ . L’un des seuls projets libres à avoir trouvé un moyen de répartir l’argent tout en gardant un fonctionnement de projet libre. en appliquant un modèle de rémunération libre à l’image du prix libre. Et qui permet à chacun de déterminer son revenu au fil des semaines , selon ses besoins, selon l’argent dispo, selon sa contribution, son usage du site, et selon ce que prennent les autres. Bref, une solution pour ce qui à mon sens a fait planter le monde associatif dans sa capacité à développer des projets contributifs à grande échelle : la manière de rémunérer ses contributeurs.
    Normalement, une structure non profit qui commence à avoir de l’argent grâce à un fonctionnement contributif décide de salarier une personne ou plusieurs (ce dernier cas étant c’est très rare car il faudrait éditer autant de contrat que de contributeur) ce qui fait que :
    – la répartition financière devient alors figée à certaines personnes et à un certain montant (on ne change pas un contrat de salariat du jour au lendemain)
    – planifiée (on décide avant qui sera rémunéré pour telle action)
    – cloisonnante, en séparant les contributeurs salariés (l’équipe salariale) des contributeurs bénévoles et du conseil d’administration. Cela entraînant des logique de gouvernance où ceux rémunérés n’ont légalement plus le droit de décider, où les contributeurs du départ se retrouvent dans des logiques de gestion managériale d’une équipe salariale plutôt que de contribution et où les contributeurs bénévoles ne s’investissent plus puisque des gens sont payés pour cela, les salariés pouvant aussi s’inquiéter que l’on fasse le boulot pour lequel ils sont rémunérés…. ( pour info, la jurisprudence du droit du travail reconnaît la chose de manière tout à fait explicite, le rapport salarial est un rapport de subordination hiérarchique )
    Alors que nous avons de plus en plus besoin d’organisations plastiques, non basées sur la planification, ouvertes, en adaptation continuelle à l’imprévisible, les projets qui ont de l’argent retombent dans ces logiques. Voir à ce sujet les modèles hiérarchiques et planifiés qui se mettent en place au sein des associations support des projets libres (fondation mozilla, ubuntu, asso wikimedia, etc…). A mon sens, ces problèmes de répartition sont au coeur des limitations du développement du libre et des communs de manière générale. Bref, si Gratipay est allé aussi vite dans son développement alors que c’est un projet libre, c’est sans doute grâce à cette petite méthode de répartition visible ici : https://gratipay.com/gratipay. Et c’est peut-être de ça dont nous avons le plus besoin aujourd’hui :-). Bref, très motivé aussi pour développer un outil de répartition financier au sein des structures contributives, basé sur le modèle gratipay, mais en l’améliorant pour permettre par exemple des contributions court terme, etc… On teste avec une communauté de developpeurs en ce moment de répliquer ce modèle en utilisant un tableur excel, mais c’est galère : https://docs.google.com/spreadsheets/d/1G2mrMPVjHzbBhy1D_ot6eVZ_U_7tRhLEbm6ZBjrOXSE/edit#gid=988720827)

  9. bonob0h dit :

    @Sarazin
    Si Gratipay est partant pour évoluer pourquoi pas !
    Sinon il y a aussi l’autre solution : rejoindre un autre projet qui va bien au delà de Gratipay et qui fait partie du package proposé à Olivier Torrente 😉
    Pour ça suffit de sonner au mail de Philippe 😉

  10. Merci d’avoir mis en avant ce point qui me semble effectivement important. A voir comment la situation évolue dans les mois qui viennent.