Une solution de domotique ouverte : DomoTab par Techno-Innov

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Je me lance dans une série d’articles visant à vous faire découvrir les acteurs du logiciel libre et de l’open source dans ma belle région de Rhônes-Alpes. Je viens d’écrire logiciel donc nous allons parler de matériel, histoire de rappeler que le libre ce n’est pas que du logiciel.

Nous commençons par la société Techno-Innov représentée par Nathaël Pajani et qui a opté pour un statut de SCOP SARL. Nathaël Pajani représente aussi l’entreprise ED3L qui est membre du Ploss Rhônes-Alpes.

De plus en plus souvent, nous avons chez nous des équipements automatisés censés nous rendre la vie plus simple. Depuis notre chaudière, en passant par des volets électriques et bien d’autres choses…

Nathaël Pajani a décidé de se lancer dans la conception d’un ensemble de composants matériels placés sous licence Creative Commons : CC-by-sa-nc afin de permettre aux bricoleurs qui sommeillent en vous de réaliser les plus fous de leurs souhaits.

Pour aider au financement de ce projet, Nathaël a choisi de faire appel aux « foules ». Ainsi vous pourrez trouver sur le site Ulule une page sur laquelle effectuer un versement. La campagne vise à rassembler 3500€ avant le 15 juillet.

Je vous livre pour finir une petite interview de Nathaël pour mieux faire connaissance avec ce dernier. Pour les amateurs, ces interviews seront toujours accompagnées d’une question troll ou question Drucker signalée par un petit pictogramme. Bonne lecture.

DomoTab domotique librePhilippe Scoffoni: Salut, Nathaël, peux-tu nous expliquer comment tu as découvert le libre ?
Nathaël Pajani : Au cours de mes études d’ingénieur, par mes professeurs (David Odin principalement) et d’autres étudiants : Cyprien, mon « mentor », qui a installé une Debian sur mon PC de l’époque, et Hubert, qui travaille désormais pour Smile.

P.S : Où en est le marché de la domotique en France ?
N.P : C’est un marché à deux vitesses, avec les grands acteurs historiques qui commercialisent des solutions très fermées, et de nombreux petits acteurs qui se développent et proposent chacun leur solution, mais avec un modèle économique commun destiné à rendre captif le client, et des solutions rarement ouvertes.

P.S : Comment t’es venu l’idée du projet DomoTab ?
N.P : Suite à la demande d’un ami libriste qui voulait des conseils pour choisir une plateforme qui lui permettrait de faire de la domotique. Il voulait développer la partie logicielle et utiliser un système matériel existant.

Il s’est avéré que plusieurs solutions logicielles existaient déjà, mais aucune plateforme matérielle ouverte donnant accès simultanément à tous les protocoles utilisés en domotique. Nous avons donc décidé de combler ce manque en créant une centrale domotique modulaire.

P.S : A qui s’adressent les produits DomoTab ?
N.P : Dans un premier temps à toutes les personnes de la « communauté des logiciels libres » qui veulent être maîtres de leur installation. En effet, nos moyens étant limités, nous ne pouvons pas développer à la fois le matériel et le logiciel.

Il faudra donc utiliser et participer au développement des solutions logicielles libres existantes (je pense tout particulièrement à Calaos et Domogik).Ensuite, tous les installateurs à même d’installer de la domotique chez les particuliers, et tous les particuliers bricoleurs.

Mod_GPIO_Demo

P.S : Quelles sont principales composantes du produit ?
N.P : La modularité et l’ouverture, et je parle de l’ouverture tant au niveau logiciel libre et matériel open-source qu’au niveau utilisation. La centrale DomoTab permet de regrouper ne nombreux équipements en un unique système (Centrale domotique, NAS, serveur multimédia …) et de centraliser la commande de tous les équipements sur ce système, remplaçant la multitude de télécommandes qui nous entourent.

L’utilisation de modules permet à l’utilisateur de choisir les interfaces dont il a besoin et ainsi d’optimiser le coût de son installation, tout en lui laissant la possibilité de faire évoluer son installation dans le temps.

P.S : Vouloir tout automatiser dans une maison, ce n’est pas se mettre à la merci de la machine ? Certaines prônent le contraire.
N.P : La domotique n’implique pas de tout automatiser. Il s’agit de nous aider quotidiennement pour améliorer notre cadre de vie. Ce que les acteurs actuels du marché de la domotique masquent derrière leurs slogans concernant les économies d’énergie possibles est en fait une amélioration du confort de vie et une amélioration des modes de consommation.

Un thermostat ne peut pas optimiser le chauffage (ou la clim) en fonction des habitudes des habitants ou de prévisions météo, tout comme le programmateur n’adaptera pas l’arrosage automatique en fonction de la pluie, de la température et de l’hygrométrie du sol. Sans parler de tout automatiser, la liste des tâches que l’on peut « domotiser » pour améliorer notre quotidien est longue, très longue.

Question_DruckerP.S : Pourquoi la clause CC-BY-SA-NC pour les éléments hardware du DTPlug ? Ce n’est pas « libre » ?
N.P : Non, en effet, pas libre selon la définition FSF, nous en sommes bien conscients et ce choix est délibéré (et appliqué à tous les éléments hardware pour l’instant). L’investissement sur un tel projet est considérable, en temps et en argent, et nous ne pouvons pas le « donner » au premier venu contre rien.

Cette licence permet déjà aux intéressés de refaire une version identique ou modifiée de nos produits pour leur usage personnel sans rien nous demander. Nous donnons même une version pour impression 3D du boîtier, et une série d’articles « making of » expliquant comment faire son propre module est en cours de parution dans le magazine Open-Silicium. Par contre, quelqu’un qui voudra en faire un usage commercial devra obtenir notre accord.

Attention, cela n’empêche aucunement la revente de produits achetés auprès de nous, et cela ne nous permet pas (au contraire) de piller les contributions de la communauté. En effet, le « SA » impose la même licence sur les modifications faites par d’autres, et nous interdit donc l’utilisation commerciale des versions modifiées par d’autres sans leur accord. C’est à double tranchant, et protège donc autant les utilisateurs ou contributeurs que nous.

Certes, cela risque de freiner les contributions sur le plan hardware, mais nous avons des raisons de croire que ce n’est pas le cas et ne concerne que quelques entreprises. Prenons le cas d’un projet bien connu, l’arduino. Il y a très peu de versions modifiées de l’arduino qui sont créées et commercialisées (41 listées sur Wikipedia), pourtant il est libre. Et je ne parle pas de l’OpenMoko. Faire du matériel libre n’est pas aussi simple que du logiciel libre.

Lorsque les premiers milliers de pièces auront été commercialisées (et que nous pourrons nous verser un salaire) nous changerons la licence des éléments hardware concernés, mais pas avant (sauf financement inattendu).

P.S : Pour quoi avoir choisi une licence Creative Common ? Il ya des licences spécifiques à l’open hardware ?
N.P : Oui, par exemple la licence OHANDA, entre autres. Ces licences respectent les 4 libertés communes aux licences « libres » mais elles sont très peu utilisées, très peu connues, et très récentes. Cela peut poser un problème au niveau compréhension par les utilisateurs, mais surtout, elles ne disposent pas de déclinaisons, contrairement aux déclinaisons des licences creative commons.

A noter que cette licence n’est utilisée que pour le matériel. Les logiciels créés sont d’ores et déjà sous licence GPLv3, et la licence pour les documentations techniques n’a pas encore été choisie.

P.S : Merci, Nathaël, d’avoir pris le temps de répondre à mes questions !

Crédit image Michel Drucker : certains droits réservés Georges Biard

Philippe Scoffoni

Je barbote dans la mare informatique depuis 30 ans (premier ordinateur à 16 ans, un ORIC ATMOS) et je travaille à mon compte au travers de ma société Open-DSI. J'accompagne les associations, TPE et PME dans leurs choix et dans la mise en oeuvre se solutions informatiques libres.

6 réponses

  1. Ghis dit :

    Merci Philippe pour cet article. Dommage pour la licence CC-BY-SA-NC, ça fait un peu open source washing et ne donne pas trop envie de participer au financement. Bon route pour le projet néanmoins.

  2. Philippe dit :

    Je ne pense pas que l’on puisse appeler cela de l’open source washing dans le cas présent. Le matériel ne sera libre que quand il aura été payé. C’est une approche possible aussi pour le financement des logiciels libres adopté par des projets comme http://www.opsi.org/fr/projets-de-co-financement qui adopte ce genre de démarche et évite aussi de tomber dans les business model impliquant, rentabilité à court terme, etc…. aui au final libère peu de code

  3. Ghis dit :

    « >Lorsque les premiers milliers de pièces auront été commercialisées (et que nous pourrons nous verser un salaire) nous changerons la licence des éléments hardware concernés, mais pas avant (sauf financement inattendu). »

    +1 Si c’est écrit noir sur blanc avec une description de la nouvelle licence ainsi que le moment précis de ce changement de licence (ex. remboursement des sommes engagées + bénéfice de X€) ça pourrait peut-être lever des réticences chez certains, en tout cas le fait que ce soit temporairement non libre le temps que vous puissiez un peu vous y retrouver côté financier serait compréhensible.

  4. Ghis dit :

    @Philippe : « Le matériel ne sera libre que quand il aura été payé.  » Oui très bien comme ça, ça permet de prendre moins de risques ou d’inciter davantage à la contribution d’autres personnes.

  5. Bonob0h dit :

    Ah ben oui !
    Nathael devrait tout payer de sa poche pour ensuite donner à tout le monde !

    Ça c’est valable quand on s’appel Xavier Niel, qu’on a fait plein de fric dans le Porno pour ensuite en gagner pleins dans la fourniture d’accès internet, on peu se permettre de dépenser tout son fric pour financer des projets comme une école, gratuite pour les méritants/meilleurs mais qui ne peuvent pas suivre les cours car de tout façon ils n’ont pas les moyen de vivre à Paris ou encore un lieu centralisé du numérique à Paris La capitale pour représenter toutes les force numériques de France alors qu’il y a mieux a faire avec la France En Web3D++ etc ou les autres développements que nous essayons de faire avancer.

    Faudrait il que nous ayons un passé de pilleurs, profiteur etc comme nombre de ces milliardaire pour se faire une virginité dans le washing equitable, etc mais comme la Fondation de Bill Gate ne consacrer que 2 % des moyens à aider et 98 % pour les investir dans des boites qui pollue, détruisent etc ?

    Mais ni Nathael, ni Philippe, ni moi n’avons pas la fortune de Xavier, ni de Grand Mamie Zinzin dans notre Famille, et que personne ne nous a donner les chiffres gagnant du prochain euromillion !

    En plus Nathael, que je n’oublie pas suite à notre conversation téléphonique 😉 doit aussi résister aux accompagnateurs d’entreprises pour qui l’opensource doit se transformer en proprio !

    Un peux comme les actionnaires d’un certain fabricant d’imprimante 3D qui alors qu’issus d’un projet opensource, fait les nouvelles amélioration en proprio, après avoir bien piller le Libre !

    Et pendant ce temps les Libriste continue de se la jouer Libertarien pire que des ultralibéraux sous couvert de masque Libre, et bien sur en gaspillant les ressources
    >> CF Libre Office chez http://philippe.scoffoni.net/lectures-et-humeurs-de-la-semaine-du-17-06-2013/

    par la dispersion comme la dispersion des plastique dans les Vortex Dépotoir qui crééent des soupes de pollution en plein pacifique ou atlantique etc …

    Le tout pendant se temps laissant le champ libre au proprio
    >>> La réalité virtuelle française (fermée) en environnement immersif #3D cc @bonob0h
    chez http://philippe.scoffoni.net/lectures-et-humeurs-de-la-semaine-du-17-06-2013/

    de faire du n’importe quoi en privilégiant des techno inutile pour tous ou alors en les ultraspécialisant comme par exemple avec des accessoires « prehensif » spécialisé d’un « c’est nous qui l’avons fait spécialement alors c’est normal que nous vous le vendions 1000 à 5000 fois le prix d’une Wiimote » Alors même que l’important est un Web3D++ pour tous, universel, décentralisé, libre, etc …

  6. @Ghis : Je comprends bien ton inquiétude, et étant moi même fondamentalement libriste j’aimerais avoir une solution satisfaisante pour libérer le matériel au plus vite.
    Je suis ouvert à tout type de financement, mais pour l’instant personne ne veut financer de projet ouvert, et encore moins sur un modèle d’économie sociale et solidaire (SCOP) (et surtout pas l’état Français …).
    Hors il est pour moi hors de question de reproduire le schéma d’un certain projet d’imprimantes 3D dont parle justement Bonob0h.

    Pour la question de « quelle licence pour la libération », je suis ouvert à toute proposition, mais ayant choisi une licence CC je pense rester sur cette famille de licence, cela simplifiera la compréhension par tous. Mais rien n’empêche une publication sous double licence, CC-by-sa et OHANDA par exemple.

    Pour la question « quand » je n’ai pas fait le calcul précis, et il est assez compliqué, car dépendant du temps nécessaire pour arriver à un certain volume de produits vendus, du coût de fabrication qui dépends aussi du nombre de produits vendus ou du moins du volume de production, et du mode de distribution.
    En l’état actuel des choses, nous avons à peu près 10 euros de marge brute sur les modules GPIO Demo que nous fabriquons nous même en France et vendons nous même, pour un investissement global (financier + temps de travail) de 20 à 25K euros.
    Il serait donc possible de fixer la barre à 2500 modules GPIO Démo vendus. Cependant, si nous parvenons à obtenir l’accord d’autres distributeurs, notre marge peut être différente, mais le volume de production aussi. Bref, très compliqué de donner un chiffre précis, mais je pense que 2500 est un bon ordre de grandeur.

    Ensuite, cela dépends aussi des investissements éventuels qui arriveraient entre temps, et des conditions de ces derniers.
    Attention, je ne parle pas d’investissement qui ne nous permettraient plus de libérer nos développements, ceux-ci ne font pas partie de nos axes de recherche de financement !
    Je parle du type de financement : dons, titres participatifs, contrats de développement, …. Si quelqu’un (ou plusieurs personnes, ou plein de personnes) nous donne(nt) 25K euros, je libère le module GPIO Démo sur le champ … la campagne Ulule est d’ailleurs encore ouverte !

    @Bonob0h : coucou 🙂
    Et merci pour tes éléments de réponse 🙂